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ENTRETIEN AVEC
SOLENN DENIS

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Solenn Denis a décidé de faire de sa vie des drames. Autrice, actrice, metteuse en scène, tous les moyens sont bons pour raconter ses histoires, vivre un cran au-dessus du réel. Passer sa vie à ça. Faire des drames. Plonger dans les profondeurs de l'âme humaine. Découvrir. Décortiquer. Comprendre. Ausculter l'âme d'anti-héro.ïne.s monstrueux.ses aux pensées erratiques, aux paroles brisées, aux failles qui bées, prêt.e.s à brouiller les pistes, sauter dans le vide, foutre le feu au destin. Travail de l'ombre et du non-dit, de l’innommable et du tabou, faire du théâtre de l'indicible. Et, avec précaution, en chérissant le mystère, doucement s'approcher d'une certaine forme de confession.

 

En 2014, elle donne jour, avec le comédien Erwan Daouphars, à la compagnie du "Denisyak" afin de porter ensemble au plateau son écriture à vif. Artistes associés de différents centres dramatiques nationaux, scène nationale et scène conventionné, ils ont créé ensemble "SStockholm", "Sandre", "Spasmes", "Scelùs", "Puissance 3", et bientôt, en 2026, "Bébé & Doudou".

 

Depuis tout ce temps, Le Denisyak expérimente la présence de l’autrice en création, comme un des rouages de la mise en scène puisque,  non seulement elle possède toutes les clefs du texte, mais peut aussi réécrire selon ce qui se passe au plateau, selon les évidences, les impasses et les énergies des corps ensemble afin que les comédien.nes puissent exulter de tous leurs possibles, réécrire jusqu'à la dernière minute dans une cohérence dramaturgique inébranlable. Et qu’ainsi ça joue fort et brûlant. Que cela brûle, oui, les planches. Et les comédien.ne.s, en état de fièvre de jeu. « Jouer sous peine de mort » disait Vitez. Travailler avec cette urgence. Sinon à quoi bon monter sur un plateau ?

Comment définiriez-vous votre style de mise en scène ?

Ce qui est tout à fait particulier, c’est que je ne mets en scène que mes textes. Parce que je les écris à haute voix et des images m’apparaissent très nettement de ce qui doit/peut être au plateau. Ça se construit malgré moi. La manière dont cela devait être joué, et ce à quoi cela doit ressembler plastiquement, surgissent dans les mots. 
Et puis, autre particularité, je n'officie pas seule. Je mets en scène en binôme avec Erwan Daouphars, co-créateur de la compagnie du Denisyak. Lui depuis le plateau, puisque toujours j’écris pour lui, lui au creux de l’oreille des autres comédien.ne.s,  et moi depuis la salle, depuis le large, dans une vision d’ensemble de comment cela doit s’emboîter, et garante de la dramaturgie.
La mise en scène doit être précise parce que je suis un peu psycho-rigide et j’aime l’harmonie. Précise et ciselée dans les placements, déplacements et gestes. Et ce que l’on voit au plateau doit nous emmener ailleurs, ou doit oser les symboles, aussi les métaphores, oser brouiller les pistes, oser tout renverser, foutre en l’air le plateau d’échec. Et on doit rester simple. Aller à l’os.  Et le ronger. Méticuleusement. 
Ah oui. Et puis je m’emmerde quand j’entends la langue avant les émotions. La langue doit glisser dans la bouche des spectateurices pour leur rouler des pelles. A mon sens c’est ça qu’elle doit faire la langue. Aussi il y a toujours une recherche d’un code de jeu très naturaliste, tout en acceptant la puissance tellurique de cet art ancestral, qui ne peut souffrir une petite quotidienneté rabougrie. 

Comment recrutez-vous vos comédien.ne.s ? Et qu’attendez-vous d’eux ?

Je sais pas si je recrute, on dirait que je travaille à La Défense avec ce mot – mais je travaille avec des comédien.ne.s que j’ai vu sur scène, que je connais ou que je rencontre lors d’auditions, et j’ai besoin qu’iels soient incroyablement souples. Que je lance des trucs, qu’iels les attrapent puis les essayent avant de penser. Et puis qu’iels lancent des trucs et les essayent avant que j’en pense quoi que ce soit. Et puis qu’on se lance des trucs comme ça. Et puis qu’à un moment on se dise : tiens on va garder ça ça et ça. Et puis ne plus en démordre. Et puis avancer. Arriver à arrêter des choses tout en les gardant extrêmement vivantes au point qu’un mouvement invisible des atomes qui se percutent nous tiennent en haleine sans fin.

Selon vous, quel est le rôle d’un metteur en scène ? Et comment faire une bonne mise en scène ?

Aucune idée. J’aime les univers singuliers. J’aime quand le travail plastique a une place importante. J’aime qu’on me retourne comme une crêpe. J’aime être surprise. J’aime la grande beauté. J’aime le travail radical. Et surtout j’ai besoin qu’on me raconte une histoire qui me permet d’être traversée d’émotions puissantes. C’est ça une mise en scène réussie, c’est quand on traverse les gens. Un public fendu en deux, et qui a accès à l’intérieur de lui-même par cette fente. 

Quel est le plus gros challenge que vous avez rencontré dans votre carrière ?

Me sentir légitime. (Work in progress)

Quelles sont vos plus grandes influences ?

Je suis infidèle par mémoire molle. J’oublie celleux que j’aime. Mais dernièrement je sais avoir été frappée fort par le travail de Thomas Ostermeier, Romeo Castelucci, Angelica Lidell, Baro d’Evel, Yan Fabre, Rodrigo Garcia, Joël Pommerat. Et si je reviens aux sources, ce sont les mises en scène d’Emmanuel Meirieu, alors que j’étais au lycée, qui ont libéré mon écriture, et puis derrière la découverte des univers de Mnouchkine, Lupa, Mouawad, Régy, Warlikovski, etc. Mais l’art contemporain m’inspire beaucoup ainsi. J’adore aller fureter dans les galeries à la recherche de grandes émotions. Des choses qui me font dire : oooh woow je suis vivante. 

Quelle est la pièce ou le texte que vous rêveriez de monter ?

Le dernier texte que j’ai écrit. C’est toujours le dernier texte écrit qui me hante. Et je serais bien incapable d’oser mettre en scène les textes des autres…
Mon syndrome de l’imposteur n’y résisterait pas ! Huhuhu. Je ris. Jaune.

Que souhaitez-vous transmettre durant votre stage au sein du Libre Acteur ?

C’est un stage où on s’essayera à écrire, puis à jouer nos mots. Que l’intérieur de nous soit notre propre matière. S’autoriser l’impudeur, le secret et l’honnêteté radicale. Avec soi. Puis trouver le chemin pour rendre cela universel. Et les moyens dramaturgiques et scéniques pour donner toute son importance aux fulgurances et au hasard. Sans recette.  

Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

Nous avons commencé à monter la production de la pièce Bébé & Doudou, prochaine création du Denisyak qui verra le jour en mars 2026 au Glob Théâtre. Cet été nous attaquerons les répétitions. Ma hâte est infinie tant les acteurices sont immenses et souples, et cela va être délicieux de travailler ensemble.

Que du néant de mon crâne ait été façonné ce texte, et que ce texte devienne une matière à expérimenter avec d’autres pour trouver comment mettre des uppercuts au public, ça me rend folle de joie toujours. 

Cette saison, l’activité est calme, alors en attendant l’impétuosité à venir de la prochaine saison, et pour ne pas sombrer folle au milieu de ce monde insensé, j’en profite pour prendre des forces en découvrant les rêves/projets/performances/réussites artistiques des autres. Et en me formant. Se former, se former se former, on n’en a jamais fini quand on est acteurice. Toujours travailler son instrument, et son instrument c’est soi, toujours travailler sur soi et sur sa boîte émotionnelle, comme un musicien fait ses gammes et s’entraîne chaque jour sur son violon/piano/guimbarde/insérer ici l’instrument de votre choix… Se tenir prêt.e, toujours, à créer. 

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